
Bobley Anderson, né le 3 mars 1992 à Abidjan, était considéré comme l’un des plus grands espoirs du football ivoirien. Milieu offensif talentueux, doté d’une excellente vision de jeu, d’un dribble élégant et d’une frappe précise, il représentait le prototype du meneur de jeu moderne. Formé à l’Académie de Foot Amadou Diallo de Djékanou (AFAD), il rejoint l’équipe première dès 2010, à seulement 18 ans. Avec le club, il se distingue rapidement, finissant vice-champion de Côte d’Ivoire en 2011 et participant à la Ligue des champions de la CAF en 2012, où ses performances attirent l’attention de nombreux recruteurs.
En juin 2012, le Wydad Casablanca, séduit par ses qualités, trouve un accord de transfert avec l’AFAD. Bobley signe un contrat de cinq ans pour un montant de 200 000 MAD. Au Maroc, il confirme son potentiel : ses dribbles déroutants, sa créativité et ses passes décisives font de lui l’un des joueurs les plus prometteurs du championnat. À peine un an plus tard, en juillet 2013, le club espagnol Málaga CF débourse environ 7 millions de MAD, soit près de 1,2 million d’euros, pour s’attacher ses services. Son arrivée en Liga espagnole est vue comme une ascension fulgurante, symbole d’un rêve devenu réalité.
Mais le rêve se transforme rapidement en cauchemar. Adaptation difficile, blessures, manque de temps de jeu, pression médiatique et solitude à l’étranger fragilisent mentalement le jeune joueur. En janvier 2014, il est prêté à Zulte Waregem en Belgique pour tenter de se relancer, puis à l’AD Alcorcón en Espagne, en deuxième division. Ces expériences successives, loin d’être salvatrices, marquent le début d’une lente descente sportive et personnelle.
Vers 2015, après avoir tenté une dernière chance à Châteauroux, en troisième division française, sa carrière s’effondre. Selon certains proches, Bobley souffre de dépression sévère. Le football ne l’anime plus. Il perd le goût du sport, puis progressivement le goût de la vie. Son contrat est résilié, et il sombre dans l’oubli. Pendant trois ans, il disparaît totalement des radars. Sa famille, ses anciens coéquipiers, ses amis : tous sont sans nouvelles.
En 2018, une vidéo apparaît sur les réseaux sociaux. Filmée dans les rues de Paris, elle montre un homme amaigri, vêtu d’une veste noire, tenant un sac plastique et une bouteille d’eau. L’homme a du mal à parler, le regard perdu. Il s’agit de Bobley Anderson, l’ancien prodige du football ivoirien. Les images font le tour du continent. La presse s’empare de l’affaire. Les réactions sont nombreuses : tristesse, indignation, incompréhension.
Selon certaines sources, Bobley vivait depuis des mois dans les rues de Paris. En état de détresse psychologique, il ne reconnaît plus grand monde, ne se souvient plus de sa carrière, ni même de son identité. Il aurait perdu accès à ses comptes bancaires, oublié les codes, les documents, et serait coupé de sa famille. Certains évoquent plusieurs tentatives d’internement, notamment à l’hôpital psychiatrique de Bingerville en Côte d’Ivoire, mais il se serait échappé, incapable d’accepter les soins.
Des années plus tard, il est aperçu à Gagnoa, en Côte d’Ivoire, errant dans les rues, demandant de l’aide, parfois de quoi manger. L’homme qui faisait rêver toute une génération est désormais méconnaissable. Sa famille, impuissante, lance un appel à l’aide. Les autorités, la Fédération ivoirienne de football, les anciens joueurs, les associations sportives sont interpellés. Beaucoup espèrent le voir pris en charge médicalement, psychologiquement et socialement.
Bobley Anderson est aujourd’hui le symbole d’un drame silencieux du monde du football : celui des jeunes talents perdus entre pression, solitude, blessures mentales et absence d’accompagnement. L’histoire de Bobley n’est pas seulement celle d’un footballeur déchu ; c’est un cri d’alarme sur la nécessité de protéger la santé mentale des athlètes, surtout lorsque les projecteurs s’éteignent.
Son histoire, tragique mais encore ouverte, reste un appel à la solidarité, à la compassion et à la responsabilité collective.